Le Sénégal doit rendre ses produits « plus compétitifs » sur le marché continental pour tirer « pleinement » avantage de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), note le Bulletin de veille et d’intelligence économique du Ministère de l’Economie, du plan et de la Coopération.
Dans sa parution du mois d’août, le bulletin édité par la cellule d’intelligence économique dudit ministère souligne que « cela passerait par un renforcement des capacités du secteur privé (producteurs, transformateurs…) en normes de qualité et de sécurité alimentaire ».
Dans ce cadre, poursuit la source, la mise en œuvre du plan d’actions prioritaires de la Stratégie Nationale de la Zlecaf (Sn-Zlecaf), adoptée par le Sénégal en 2020 et financée à hauteur de 145,5 milliards FCFA, devrait être accélérée.
L’on rappelle que cette stratégie accorde une priorité aux activités capables d’améliorer la contribution des femmes et des jeunes au développement des capacités productives et à la création de nouvelles opportunités d’accès aux marchés d’exportation des biens et services.
En outre, le bulletin indique que le Sénégal devrait, également, relever le défi relatif au développement de l’offre de services, notamment des flux de trafic de tous les modes de transport, si l’on sait que plus de 25% des gains du commerce intra-africain de services et près de 40% de l’augmentation de la production de services en Afrique concerneraient ledit secteur.
Ainsi, des politiques de renforcement des investissements en infrastructures routières, ferroviaires, maritimes et aériens doivent être une priorité. En outre, la disponibilité des données statistiques, la bonne connaissance des acteurs et la levée des obstacles réglementaires doivent être améliorées.
La production halieutique industrielle sénégalaise
Au Sénégal, les statistiques officielles montrent que près de 40% des exportations se font en Afrique, essentiellement dans l’espace CEDEAO, contre 17% des importations. La Zlecaf offre aux entreprises sénégalaises l’opportunité d’accéder à un vaste marché de plus de 1,4 milliard de consommateurs.
Les unités de production locales peuvent, en effet, désormais accéder à d’autres segments de marché faiblement ou pas encore explorés, notamment en Afrique centrale et à l’Est du continent.
Au plan sectoriel, la pêche industrielle peut particulièrement tirer profit du marché de la Zlecaf, au regard de son important excédent (136392 tonnes) commercial enregistré entre 2008 et 2018. Le surplus haussier de la production halieutique industrielle sénégalaise pourrait, en partie, être expédié sur le marché africain.
Dans la même veine, les cimenteries et la branche « fabrication de sucre, confiserie et chocolaterie » ont une opportunité d’augmenter leurs volumes d’exportations en Afrique.
S’agissant du secteur artisanal local, longtemps confronté à la difficulté de commercialisation de ses produits, il profiterait de ce marché commun, en s’appuyant sur une meilleure politique de communication, notamment en ce qui concerne l’artisanat d’art, particulièrement de la cordonnerie. A cet égard, une formation des acteurs aux ventes en ligne accroitrait la visibilité des produits « made in Sénégal » en dehors du territoire national.
Relativement au commerce des services, le Sénégal a des avantages comparatifs réels (beaucoup plus importants que dans les ventes de marchandises) qu’il convient de mieux exploiter. Le pays est classé au troisième rang dans la zone Cedeao en matière de « commerce électronique », derrière le Nigeria et le Ghana, et au quatorzième niveau continental. Les entreprises nationales devraient, ainsi, davantage s’appuyer sur le numérique, notamment sur l’exploitation du fort potentiel des services en ligne en matière d’éducation (enseignement à distance), de santé (la télémédecine: assistance médicale, diagnostic et transfert d’images pour le traitement et la simulation), de finances ou du tourisme.
De plus, le système de dématérialisation des procédures douanières Gaïndé 2000, déjà largement exporté en Afrique, peut être un soutien déterminant pour le développement du commerce de services.
Pour certaines autres branches d’activité sénégalaises, une redynamisation est nécessaire pour davantage gagner ou reconquérir des parts de marché dans la zone. C’est le cas de l’industrie textile dont les parts de marché se sont effritées en Afrique de l’Ouest ou encore de « la fabrication de tabac ou de produits à base de tabac » qui a perdu sa première place des fournisseurs d’Afrique centrale.
Mise en place en janvier 2021, la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) vise, entre autres, à créer un marché unique des biens et des services, favorisé par la circulation des personnes, pour renforcer l’intégration économique du continent africain. L’accord, qui ambitionne d’intégrer l’ensemble des 55 pays africains (seul l’Erythrée n’est pas encore signataire et 42 pays ont ratifié), prévoit une suppression des droits de douane pour 90% des lignes tarifaires sur cinq (5) ans pour les pays les plus développés et sur dix (10) ans pour les pays les moins développés. Les droits de douane devront être supprimés à une échéance ultérieure pour 7% des lignes tarifaires.
Selon la Banque mondiale, la Zlecaf pourrait sortir 30 millions d’africains de l’extrême pauvreté et augmenter les revenus de près de 68 millions d’autres personnes qui vivent avec moins de 5,5 dollars par jour.
Elle devrait, également, augmenter de 450 milliards USD ou 7% les revenus de l’Afrique d’ici à 2035, tout en ajoutant 76 milliards USD aux revenus du reste du monde, accroître de 560 milliards de dollars les exportations africaines, essentiellement dans le secteur manufacturier, favoriser une progression salariale de 10,5% pour les femmes contre 9,9% pour les hommes et augmenter les salaires des travailleurs non qualifiés ainsi que de la main d’œuvre qualifiée de respectivement 10,3% et 9,8%.